COMMENT RESTER ÉCOLO SANS FINIR DÉPRESSIF
Laure Noualhat, Editions Tana 2020
Laure Noualhat est journaliste à Libération spécialisée dans les questions d’environnement : « en 15 ans de présence, j’ai écrit 1522 articles, dont 90% sur des questions d’environnement». Elle est donc devenue « écolo radicale » « L’écologie a peu à peu grignoté ma vie en m’ouvrant les yeux. Une fois réveillée, je n’ai pas pu me rendormir ». Et comme beaucoup, elle a senti monter l’éco anxiété en voyant les enjeux énormes et le peu d’action.
Et puis est venu le COVID qui lui a montré qu’il pouvait y avoir des chocs qui font bouger les lignes « Le coronavirus est mon ami. Comme toutes les crises qui l’ont précédé ». Cette dernière lui a donné envie d’écrire sur comment tenir debout face à cette éco-anxiété et les effondrements à venir. « Pour tenir debout, il faut déprimer, il faut y aller franco, embrasser l’angoisse à pleine bouche, avant de l’abandonner sur le bord de la route ».
C’est ce que raconte cet ouvrage structuré autour de deux grandes parties.
Dans « tomber en écologie », elle décrit d’abord ce que c’est : « L’éco-anxièté, la dépression climatique, la solastalgie, la dep’ecolo, le burn-out bio…autant de formules pour désigner un mal de terre version maousse avec effondrement et fin de la civilisation humaine à la clé ». Elle passe en revue ensuite les différentes étapes par lesquelles passent tous les écolos : le choc, le déni, le « tambour de la machine à laver » (colère, impuissance, peur, douleur), et enfin la dépression.
Elle rassure ensuite ses lecteurs « Etre éco anxieux, c’est normal » « aller fort bien dans un monde qui ne tourne pas rond signe la vraie maladie, tandis que souffrir de ce qui se passe est très bon signe ». Et il faut accepter de ne pas pouvoir sauver le monde : « peu à peu, je
comprends qu’on peut tenter de changer le monde, mais que l’on peut vivre en acceptant de ne pas y parvenir ».
La deuxième partie propose de « regrimper à la vie ».
D’abord ne pas rester seul : « il faut se connecter à des gens au courant, participer à des ateliers, aller à des réunions, pratiquer la gratitude et l’amour ».
Ensuite, vivre pleinement, rire (« le rire est séditieux »), jouer, méditer. « Avec la gratitude, la méditation est gratuite, accessible à tout instant et presque n’importe où, fortifiante, exterminatrice de pensées ruminatoires…ce n’est pas avec elle que l’on va relancer la croissance économique ! »
Se reconnecter à la nature : « parmi les trucs et astuces qui permettent d’apaiser l’éco- anxièté , l’expérience de nature est à imposer derechef dans nos agendas surchargés » . Mais gare à l’effet boomerang « seul le contact avec la nature nous apaise, mais regarder la nature, c’est regarder ce qu’on a réussi à détruire ou qui va l’être prochainement ».
Enfin, inventer (« et si le temps à venir était celui du délire ? celui où l’on réinventait tout ? ») et faire : changer de cadre de vie, résister localement, militer joyeusement, agir « Agir a un effet libérateur : les personnes s’alignent avec leurs valeurs , ils ne sont plus simplement propriétaires, ils deviennent créateurs de leur existence ».
Un livre riche de témoignages et d’idées, parfois un peu décousu. Je retiendrai le sens de la formule de l’auteur qui nous dit en conclusion de l’avant-propos : « Nourrir l’enfant en nous, le faire sourire chaque jour, c’est un beau projet pour les décennies qui viennent ».